Crise énergétique: 4 leçons et une prédiction audacieuse

La crise énergétique frappe avec une force extraordinaire.

Il est temps de tirer quelques leçons préliminaires et de faire une prédiction (audacieuse).

Première leçon: le système doit être soutenu

Le système de marché est un jeu de dominos fragile lorsqu’il subit un très gros choc comme la multiplication par dix du prix de l’essence.

Un tel choc risque de renverser des dominos qui à leur tour entraînent d’autres dominos.

Cela s’est également manifesté lors de la pandémie lorsqu’une baisse soudaine de la production et des revenus a menacé de plonger des milliers de petites et grandes entreprises dans l’abîme.

Ce risque existe aussi aujourd’hui.

Les entreprises confrontées à des factures énergétiques hallucinantes peuvent faire faillite et entraîner d’autres avec elles.

Un tel système doit être soutenu et cela ne peut être fait que par le gouvernement.

Nous l’avons fait pendant la pandémie avec un soutien temporaire massif aux entreprises et aux travailleurs qui risquaient de perdre leur emploi.

Il faudra qu’il en soit de même aujourd’hui, toujours avec des mesures de soutien aux entreprises et de soutien au pouvoir d’achat des familles les plus démunies.

J’entends déjà les plaintes de mes détracteurs: nous n’avons plus d’argent pour cela.

Exactement ce que j’ai entendu pendant la pandémie.Des déficits budgétaires plus importants sont en effet un problème, mais ne pas soutenir le système est un problème encore plus important car la chute des dominos plongera inutilement de nombreuses personnes dans la misère. En fin de compte, ce sera encore pire pour le budget.

Ce soutien doit être temporaire, comme il l’a été pendant la pandémie, et il le sera.

La raison en est que les prix de l’énergie sont artificiellement élevés aujourd’hui et vont encore baisser.

J’arrive ainsi à ma deuxième leçon.

Deuxième leçon: les prix ne reflètent plus la rareté

Aujourd’hui, les prix du gaz et du pétrole sont déterminés sur les marchés financiers, en particulier sur les marchés à terme.

Ces derniers sont dominés par la panique depuis la guerre en Ukraine.

L’ambiance est: « On va vers des temps terribles » et « On n’en sortira jamais ».

Cette humeur de panique a conduit les prix du pétrole et, en particulier, les prix de l’essence à grimper beaucoup trop haut.

Les prix ne reflètent plus la rareté, mais l’atmosphère panique de la fin des temps.

Et ces prix recommenceront à baisser lorsqu’il deviendra clair qu’il y a suffisamment de gaz et de pétrole dans le monde, mais le problème est de savoir comment les acheminer là où ils doivent être.

Ces prix spéculatifs élevés ont un effet destructeur sur le tissu social et économique: le tissu social parce que tant de personnes sont particulièrement touchées et que d’autres deviennent très riches; le tissu économique parce que des milliers d’entreprises qui fonctionnent bien reçoivent un coup de massue.

Troisième leçon: il faut bloquer les prix

Dès le début, il était clair que le gouvernement devait intervenir dans le mécanisme du marché.

Il est en effet inacceptable que les forces spéculatives sur les marchés financiers causent autant de dégâts.

Les gouvernements ont hésité parce qu’ils étaient mentalement bloqués par une combinaison de dogmes économiques et une croyance erronée en leur propre impuissance.

Le dogme économique était qu’il ne fallait pas intervenir dans le mécanisme des prix; l’impuissance est venue de la croyance que ce sont des forces qui nous dépassent et contre lesquelles nous ne pouvons rien.

Les deux ont tort.

Nous pouvons et devons temporairement bloquer les prix.

Le gouvernement français a fait ce qu’il fallait faire.

L’inflation est d’environ 5% en France, et de 10% partout ailleurs en Europe.

Cela devient maintenant clair partout.

Cependant, la plupart des dirigeants politiques hors France ont attendu bien trop longtemps.

Quatrième leçon et une prédiction audacieuse

Les prix de l’énergie chuteront, mais resteront au-dessus des niveaux d’avant-guerre.

Ce fut également le cas après la crise pétrolière des années 1970.

Depuis les années 1980, les prix du pétrole ont recommencé à baisser, mais ils ne sont jamais descendus en dessous des niveaux d’avant la crise.

Ce sera désormais aussi le cas.

Et c’est une bonne nouvelle.

La hausse permanente des prix des combustibles fossiles accélérera la transition vers des sources d’énergie respectueuses de l’environnement et déclenchera un nouvel élan vers de nouvelles économies d’énergie pour les entreprises et les consommateurs.

C’est un domaine où le mécanisme des prix fera ses preuves.